dimanche 10 janvier 2016

Une allusion à Flavius Josèphe dans l'Évangile de Jean

Dans l'Évangile de Jean, en Jean 3, 25, nous lisons un très étrange passage:
Or, il s’éleva de la part des disciples de Jean une dispute avec un Juif touchant la purification. 
On s'attendrait à avoir quelque écho de la polémique sur la purification en Jean 3, 26 et suivants, mais cette polémique ne s'y trouve pas. On lit juste que Jésus baptise et fait plus de disciples.
Le Père Émile Boismard a proposé de placer les versets 3, 23–25 , entre 1, 18 et 1, 19, ce qui est certes plus logique, si ce n'est que nous ne trouvons pas plus la polémique sur la purification, seulement une discussion dans laquelle Jean affirme qu'il n'est ni le christ ni un prophète.

En fait le verset 3, 25 est un anachronisme, l'auteur du verset considère que le baptême de Jean sert bien au pardon des péchés. Et dans les Antiquités Juives, 15, 5, 8, nous lisons le passage suivant:
En effet, Hérode l’[Jean le Baptiste] avait fait tuer, quoique ce fût un homme de bien et qu’il excitât les Juifs à pratiquer la vertu, à être justes les uns envers les autres et pieux envers Dieu pour recevoir le baptême; car c’est à cette condition que Dieu considérerait le baptême comme agréable, s’il servait non pour se faire pardonner certaines fautes, mais pour purifier le corps, après qu’on eût préalablement purifié l’âme par la justice. 
Comme on le lit très clairement dans Flavius Josèphe, le baptême de Jean consiste en des ablutions purificatrices du corps et non en un baptême de repentance comme le prétendent les évangélistes.
Le passage des évangiles s'éclaire parfaitement:
Or, il s’éleva de la part des disciples de Jean [c'est-à-dire l'auteur de l'Évangile de Jean] une dispute avec un Juif [Flavius Josèphe] touchant la purification [à savoir, est-ce que c'est le baptême qui purifie comme le prétendent les évangiles, ou est-ce la pratique de la vertu, c'est-à-dire, des commandements, qui procure la purification, comme le prétend Flavius Josèphe].
L'opinion de Flavius Josèphe est très certainement la bonne, par exemple, les évangiles disent que Jean était vêtu du peau de chameau, animal non casher, et on sait que les qohen se vêtaient de lin, et aussi que Jean mangeait des sauterelles, outre que les sauterelles sont douteuses, les prêtres étaient en général végétariens.
De plus, Flavius Josèphe raconte que
Jugeant même insuffisante l’expérience que j’en avais tirée [des trois écoles juives pharisiennes, sadducéennes et esséniennes], quand j’entendis parler d’un certain Bannous qui vivait au désert, se contentait pour vêtement de ce que lui fournissait les arbres [c'est-à-dire du lin probablement], et pour nourriture, de ce que la terre produit spontanément [donc des fruits, et probablement du pain], et usait de fréquentes ablutions d’eau froide de jour et de nuit, par souci de pureté, je me fis son disciple. Après trois années passées près de lui, ayant accompli ce que je désirais, je revins dans ma cité.
Bannous est certainement un disciple authentique de Jean.
Notons qu'il est mentionné dans les évangiles, mais ce nom n'apparaît pas à cause d'une erreur de traduction (Matthieu 3, 7b–9 et Luc 3, 7b, 8):
7b. « Races de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir ? 8. Produisez donc du fruit digne de la conversion [metanoias], 9. et ne prétendez pas dire en vous-mêmes: “Nous avons Abraham pour père!” Car je vous déclare que de [ces pierres, araméen: âbannayâ] Bannous [araméen: Bannayâ] Dieu peut susciter des enfants à Abraham [ce qui implique que Bannous était un converti et n'était pas juif de naissance. En effet, le passage fait allusion aux polémiques au sujet des convertis, certains considérant leur descendance comme non-juive, et Jean Baptiste dit que la postérité du converti est aussi juive que la postérité naturelle d'Abraham.] 
Ce verset sur lequel même le célèbre Lagrange se demandait quel sens il fallait lui attribuer, en effet quel rapport peut-il y avoir entre ces pierres et une postérité à Abraham, et du fruit digne de la conversion, devient très simple à comprendre si on admet cette faute de traduction et que le passage mentionne Bannous [araméen vraisemblable: Bannayâ], au lieu de ces pierres [araméen: âbannayâ]. Quant à Bannous, ce serait un converti, au judaïsme puisque le texte fait allusion à la postérité des convertis.
Ces histoires de baptême du pardon des péchés est typique du pagano-christianisme et opposé aux conceptions du christianisme original qui est le judéo-christianisme. Le judéo-christianisme était un judaïsme pratiqué par les non-Juifs, qui pratiquaient les commandements comme n'importe quel Juif et qui ne considéraient pas que Jésus était dieu, mais seulement un prophète qui a enseigné les secrets de la Torah.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire